Jusqu’à mercredi dernier, peu d’entre nous avaient entendu le nom d’Alain Therrien, mais peu de temps après qu’il a été sermonné par le NPD, nous avons appris que le député du Bloc québécois était « raciste » — l’insulte suprême qu’on peut lancer à une personne blanche d’origine européenne.
En raison des propos non parlementaires tenus par le chef du NPD Jagmeet Singh à l’endroit de Therrien à la Chambre des communes et de son refus de retirer ses propos, le nom du député du Québec est aujourd’hui entaché de racisme.
L’allégation de Singh est tout autant sans fondement que celle d’un universitaire américain qui a estimé que le film classique de Disney Mary Poppins était « raciste »
Jagmeet Singh n’avait peut-être pas entendu parler de Vivian Barbot, une Noire d’Haïti qui était députée et qui est devenue chef intérimaire du Bloc québécois à la suite de la démission de Gilles Duceppe en 2011.
Le Bloc est alors devenu exactement le contraire de ce que Singh prétend être : Barbot est devenue la première personne d’une minorité visible à diriger un parti politique fédéral canadien, et non Jagmeet Singh.
Lorsqu’elle était chef intérimaire, elle n’était pas vraiment une députée en poste, car elle avait été défaite en 2008 par Justin Trudeau dans la circonscription montréalaise de Papineau. Pourrait-on qualifier Trudeau de raciste pour s’être présenté contre une femme noire ? Bien sûr que non. Même ses photos le montrant avec le visage peint en noir n’ont pas en fait qu’on le traite de raciste.
En tant que partisan de Black Lives Matter et en tant que personne ayant vécu le racisme vicieux et flagrant dans le monde arabe, où les Noirs sont souvent appelés « esclaves », j’ai passé la dernière semaine à réfléchir à l’importance de la race et du racisme tout en vivant dans une famille plutôt unique.
Depuis mon enfance, je suis entouré des membres blancs de ma famille. Ma grand-mère était française. J’ai une tante italienne et mon gendre est d’origine grecque. Ma nièce et mon neveu qui ont grandi aux Pays-Bas sont aujourd’hui mariés à des conjoints blancs, tandis que les nièces de ma femme ont introduit Terre-Neuve et la francophonie ontarienne chez nous en se mariant à des hommes merveilleux qui apprennent maintenant à cuisiner de la cuisine indienne. Une troisième soeur a introduit la magie de la culture indo-africaine.
Au Pakistan, « Meg » et « Carol » ont épousé mes cousins Ayaz et Khalid alors que le nom de famille de leur sœur Naheed est Blackwell. La famille est un potpourri agréable.
Depuis plus de 30 ans que je vis au Canada, je peux compter sur mes doigts les occasions où j’ai dû faire face au racisme des hommes et des femmes blancs. J’ai entendu la phrase « vous autres » sur le train GO* et on m’a interdit d’acheter une maison parce que l’agent d’immeubles avait promis aux voisins qu’il ne vendrait la maison qu’à ceux qui étaient un « bon choix ». Ce moment, en 2001, m’a profondément ébranlé, mais cela voulait-il dire que tous les autres membres du quartier huppé étaient « racistes » ?
Cela dit, c’est un Blanc, feu Julius Deutsch (un gauchiste australien), qui m’a donné mon premier emploi décent, et c’est un Blanc, feu Peter Worthington (pas un gauchiste) qui m’a demandé d’être chroniqueur hebdomadaire dans The Sun.
Je demande à Jagmeet Singh de présenter ses excuses à Alain Therrien. Ainsi, vous montrerez votre grandeur. En refusant de le faire, vous laisserez un triste héritage. Et quand vous aurez le temps, veuillez lire W. E.B. Du Bois.
Voici une citation de lui pour vos réflexions : « Non, le problème racial qui m’intéressait transcendait les lignes de couleur, de physique, de croyance et de statut, et était une question de structures culturelles, d’enseignement pervers, de haine humaine et de préjugés, qui touchaient toutes sortes de personnes et causaient un mal sans fin à tous les hommes. »
Traduction : Laurence B
*Train interrégional qui relie Toronto aux régions environnantes.
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TAREK FATAH en français 